Mala junta
Claudia Huaiquimilla | Chili | 89’ | 2017
Pour éviter l’internement dans un centre de rééducation, une solution de la dernière chance s’offre à Tano, 16 ans. Il est expédié dans le sud du Chili chez son père qu’il n’a pas vu depuis des années. Entre l’ennui de la vie à la campagne et le ressentiment pour son père, une amitié va naître entre l’ado rebelle et Cheo, un garçon timide et maladroit harcelé en raison de ses origines indigènes. Alors que la communauté mapuche doit faire face à de fausses accusations et affronte la violence policière, Tano découvre des facettes de Cheo qui vont forcer son respect. D’origine mapuche, la réalisatrice a voulu mettre en scène dans un contexte politique particulier, celui de la violence exercée contre les Mapuches, une trajectoire commune de deux ados souffrant des préjugés et cherchant à trouver leur place dans un monde duquel ils sont laissés en marge.
Claudia Huaiquimilla
Claudia HUAIQUIMILLA (Chili, 1987) est diplômée en direction audiovisuelle de l’Université Catholique du Chili. Son court-métrage San Juan, la noche más larga (2012) abordait ses racines mapuches. C’est également le sujet de son premier long-métrage Mala junta produit et tourné dans une communauté mapuche.
Article publié le Mardi 13 mars 2018 signé par Stanislas Claude et disponible sur le site : https://publikart.net/belle-histoire-dadolescents-film-chilien-mala-junta/
Une belle histoire d’adolescents chiliens dans le film Mala Junta
Le premier film de la réalisatrice chilienne Claudia Huaiquimilla s’intéresse à Tano et Cheo, deux adolescents aux destins contraires et aux influences cruciales sur leurs existences respectives. Le premier est autant turbulent et colérique que le second est placide et sujet aux moqueries de ses camarades. Le film très réaliste, voire naturaliste, se concentre sur une période de la vie de tous les possibles tout en pointant du doigt le combat pour la défense du territoire Mapuche, communauté aborigène objet d’une féroce répression par le gouvernement central chilien.
Destins croisés
Mala junta, que l’on peut traduire par Mauvais conseil en français, se concentre d’abord sur Tano, jeune homme en pleine crise d’adolescence confié par sa mère dépassée à son père plus rigoureux. Le film suit son déménagement dans le sud du Chili comme une dernière chance pour lui éviter un centre de redressement. Mais le jeune homme n’écoute pas et continue ses petits larcins en toute impunité. Ce n’est qu’en faisant la rencontre de Cheo qu’un profond changement va s’opérer. Car le second d’origine mapuche est le souffre douleur des terreurs du lycée. La réalisatrice opère une métaphore filée entre les revendications de l’identité amérindienne et la destinée des deux garçons. Au fur et à mesure que Tano et Cheo se lient d’amitié, le second s’implique de plus en plus dans la défense du territoire Mapuche tout en aidant le premier à canaliser sa colère. Doutes et coups de théâtre émaillent un film qui semble tourné caméra à l’épaule avec un naturalisme fascinant pour mettre en lumière l’inanité du gouvernement chilien qui ne ménage pas ses populations indigènes, voire les brime. Au début du film, Tano symbolise un peu ce gouvernement chilien qui fonce tête baissé sans se soucier du monde qui l’entoure pour devenir au contact de Cheo plus concerné par les questions sociales. Mais si le destin des deux adolescents va connaitre un cercle vertueux, le gouvernement chilien lui ne change pas de politique d’exploitation abusive des terres mapuches. Le film interroge sur une politique quasi colonialiste qui, par delà les changements de gouvernement, ne se modifie pas et ne cesse de malmener la communauté mapuche. Les deux jeunes comédiens Andrew Bargsted et Eliseo Fernández sont épatants dans leurs rôles et magnétisent l’attention du spectateur avec leurs mines d’ados qui se confrontent aux problèmes de la vie.
Mala junta fait partie de ces petits films venus d’ailleurs qui ouvrent une lucarne sur une réalité mal connue via une histoire d’amitié et de révélation. Mala junta sort le 14 mars sur les écrans français pour un grand bol de dépaysement.