Investigation Continue. Colombie Une Nation en Exil 1er janvier 1971 jusqu’au 31 décembre 2023.
Association Notre Amérique Lointaine, Directeur Alcides Lesmes Bula.
Coordinateur International d’Investigation Nelson Restrepo Arango
Fragments du rapport Colombie, une nation en exil 2024
Introduction
L’exil politique doit être considéré comme un crime d’État, car c’est l’État qui, par le biais d’une stratégie de terreur, introduit dans un plan national, la dynamique de la violence sociale et politique utilisée à des fins de contrôle territorial, en perpétrant ces actes contre des dirigeants et des milliers de militants de base des forces qui s’opposent au régime oligarchique qui détient le pouvoir territorial, en les persécutant jusqu’à ce qu’ils quittent le territoire national. Mais il est vrai aussi que les conséquences de l’exil vont au-delà de ces limites politiques, jusqu’aux combattants sociaux et politiques qui souffrent non seulement de l’impuissance de ne pas pouvoir continuer à lutter pour leurs idéaux en première ligne et à contribuer à l’organisation sociale, mais aussi du fait que leurs projets de vie sont tronqués ; toutes leurs relations affectives, professionnelles, de voisinage, commerciales et communautaires, leur environnement familial et social sont anéantis. L’exil présente donc plusieurs caractéristiques qui sont essentielles lorsqu’il est produit et conduit par l’État lui-même dans le but de causer des dommages sociaux et politiques. L’un des résultats de cette production de l’exil est l’impunité.
L’exil est le résultat d’une chaîne d’actes criminels perpétrés par l’État. Il existe une nation en exil et ses impacts sociaux, psychiatriques, de santé publique et mentale, politiques et culturels constituent un défi à déterminer : manque à gagner, dommages consécutifs, effets psychosociaux, deuxième génération d’exilés, réparation individuelle, perte d’études, d’emplois, d’identité, d’intégration, de meubles et/ou de biens immobiliers, de comptes bancaires ; l’abandon forcé de responsabilités en général sur le territoire national, régional ou local dans la direction ou la promotion du militantisme, et de la défense sociale syndicale, entre autres.
Il existe une Nation en exil dispersée par la violence politique contre les opposants à l’État colombien de plus de 1 875 750 Colombiens et Colombiennes (1) et c’est l’objet de ce travail de recherche que nous avons commencé à développer depuis 2016 sur la base du travail accumulé au fil des années.
Réflexions
Dans ce contexte, les réflexions suivantes se posent :
Le fait qu’il y ait plus de 9 500 000 émigrants colombiens, dont beaucoup sont exilés de force, et que 1 875 450 d’entre eux bénéficient d’un statut de protection, d’un refuge ou au moins d’une demande en ce sens, est-il important ou non ? Leurs cas sont-ils poursuivis ou restent-ils impunis ? Existe-t-il des programmes, des mesures et des règles de réparation collective pour les exilés ?
L’exil est l’un des groupes de victimes avec l’un des problèmes les plus urgents à traiter dans ce processus de réparation des victimes dans le cadre du conflit politique armé, comme dans le scénario de mise en œuvre de l’accord final entre le gouvernement colombien et les FARC EP du 24 novembre 2016, et sa résolution dépendra dans une large mesure du traitement qui lui sera réservé dans le processus lui même.
Par conséquent, en tant que victimes persécutées par l’État colombien et le paramilitarisme, nous assumons la responsabilité de proposer les lignes directrices d’un programme de justice, de réparation et de garanties de non-répétition basé sur la vérité historique dont nous sommes les protagonistes et nous exigeons qu’elle soit traitée d’une manière particulière, en élargissant la pertinence juridique de la loi sur les victimes, qui élude ou omet simplement l’existence de l’exil en tant que responsabilité politique et juridique de l’État colombien à l’encontre de l’opposition.
Cela dit, de nombreux doutes surgissent lorsqu’il s’agit de définir qui sont les victimes (loi 1448 de 2011). Il semble que les victimes soient le résultat d’un conflit dans lequel l’État colombien était un point à part, c’est-à-dire qu’il n’était pas l’une des parties du conflit, ou que ceux qui ont pris part au conflit étaient des agents de l’une ou l’autre partie sans aucune relation avec l’État colombien. Compte tenu de cette faiblesse et de cette incohérence juridique concernant la responsabilité de l’État colombien, nous demandons l’accompagnement d’organisations travaillant dans le domaine des Droits Humains en général et de l’exil politique en particulier, telles que le HCR, Amnesty International, le CPDH (Comité permanent pour la défense des Droits Humains), MOVICE*, la Croix-Rouge internationale, la Croix-Rouge colombienne, CEAR, entre autres, qui garantiraient l’exécution de nos demandes en tant que victimes du conflit politique, social et armé en Colombie.
Compte tenu de tout ce qui précède, nous affirmons être des victimes sociales et/ou politiques de l’État colombien. Nous sommes des personnes qui avons fait partie de processus et d’organisations ayant des responsabilités politiques et qui se sont opposées à l’État pour ses manquements à la Constitution et aux lois, et à cause de cet exercice de mobilisation, de dénonciation et de demande de respect des engagements, nous avons été menacés, déplacés, torturés, emprisonnés, détenus et/ou disparus, exilés et dépossédés de nos biens pour avoir essayé de participer au processus de construction d’institutions politiques de notre société qui obéissent à un authentique État social fondé sur l’État de droit.
Par conséquent, notre défi fondamental est de faire reconnaître notre droit à la vérité, à la mémoire, à la justice, à la réparation intégrale et à la non-répétition de l’exil. Cette exigence nous amène à penser à un avenir avec un retour planifié, organisé, avec des garanties et dans la dignité. Sans aucun doute, la principale garantie est le démantèlement des groupes paramilitaires en Colombie, qui est l’un des accords fondamentaux de La Havane et notre objectif fondamental – non seulement pour les exilés, mais pour l’ensemble de la population colombienne – est d’exiger sa mise en œuvre en tant que priorité.
La mise en œuvre crée un scénario d’organisation et de structuration des victimes de l’exil politique des ressortissants à l’étranger. Nous, exilés politiques, entrons dans la ratification de l’accord final, et nous avançons ainsi vers une nouvelle étape, qui est la fin du conflit politique et armé dans le pays, pour la construction d’une paix stable et durable, en d’autres termes, nous avançons vers un processus complexe d’approbation et de mise en œuvre. Sur le chemin de la paix avec justice sociale, obligatoirement, nous nous considérons comme des victimes de l’exil politique dans le processus de guerre et des victimes dans le processus de paix.
* MOVICE : Mouvement National de Victimes de Crimes d’Etat
Pour aller plus loin, vous pouvez consulter les pages suivantes :
CAJAR Colectivo José Alvear Restrepo
https://www.colectivodeabogados.org/
CJL Corporation Juridique Liberté
https://cjlibertad.org/
CNMH Centre National de la Mémoire Historique
https://centrodememoriahistorica.gov.co/
INDEPAZ
Institut d’études pour le développement et la paix
https://indepaz.org.co/
MOVICE Mouvemment National de Victimes de Crimes d’Etat
https://movimientodevictimas.org/